Jana


C’était une petite femme blonde, très menue, toujours sur le qui-vive et souriante. Les genoux un peu pliés dans une attitude de soumission craintive, elle semblait vouloir fuir les regards et on eut été bien en peine de dire quel âge elle pouvait avoir. Comme elle était toujours alerte, on était tenté de la croire jeune. Pour peu qu’on réussissait, ce qui n’était pas facile, à l’examiner de plus près, on distinguait un visage lisse au regard clair et inquiet, sans rides apparentes. On savait très peu de choses d’elle et on n’avait pas cherché à en savoir. Elle venait de Slovaquie où sa famille avait toujours vécu. On ne savait pas pourquoi elle avait quitté son pays pour venir travailler en France. On savait qu’elle devait se lever très tôt le matin pour prendre le premier train de banlieue vers Paris. Elle parlait un français difficile mais réussissait à comprendre les instructions que lui donnait Mme Lemplein (c’était l’essentiel.) Mme Lemplein une journaliste très occupée et surtout comme c’est souvent le cas, très occupée à rencontrer les gens qu’il faut connaître, était l’épouse du député bien connu pour ses discours pourfendant les riches et toujours à la pointe des mouvements de contestation sociale. On lui prédisait un grand avenir et on s’étonnait même qu’il n’ait pas encore été nommé ministre. Pourtant M. Lemplein était très ambitieux et ne ménageait pas ses efforts pour être sous les feux des projecteurs des médias et pour atteindre la place de secrétaire général du parti : «Pour un Véritable Renouveau, le PVR ».
Jana arrivait tôt le matin, s’activait de façon discrète pendant que Monsieur et Madame Lemplein prenaient leur petit-déjeuner. Elle savait ce qu’il fallait faire. On ne la remarquait même plus. Ses heures de ménage terminées, elle s’éclipsait tout aussi discrètement. En fin de mois, on oubliait fréquemment de payer son salaire. Vers le milieu du mois suivant, Jana finissait par oser s’approcher de Mme Lemplein ou de M. Lemplein qui, à sa mine confuse, se rappelaient qu’ils avaient encore oublié de la payer. On s’empressait de le faire (Jana était une « perle » et M. et Mme Lemplein eussent été bien embarrassés de la perdre) en lui renouvelant des excuses.
Puis un jour, après une vive dispute, Mme Lemplein fit ses valises et quitta son mari. Non décidément, celui-ci n’était qu’un politicien sans scrupules. N’allait-il pas faire un discours dans lequel il fustigeait une immigration devenue incontrolable et source de troubles sociaux ? Quand on était de gauche, on devait être ouvert sur le monde et fustiger les capitalistes qui encaissaient la plus value du travail mal rémunéré des immigrés, pas les immigrés eux-mêmes. C’était la ligne rouge de la sécurité que la droite modérée dite républicaine avait toujours réussi à tracer avec la gauche et derrière laquelle la gauche rongeait son frein et Madame Lemplein à qui le jeune Leduc, l’étoile montante du parti faisait les yeux doux, s’en indigna publiquement. …sauf que cela eut l’effet absolument inverse dans l’opinion. Ah enfin un député qui était à l’écoute des préoccupations sociales des Français et en même temps, voulait ramener l’ordre dans les « territoires et quartiers ensibles où la République n’était pas la bienvenue »! Dans les milieux des élus, on n’osait pas le dire ouvertement pour ne pas être traité de «populiste», mais bon il fallait bien admettre que c’était …populaire. C’était assez comique de voir les membres du PVR prendre des expressions offusquées lorsqu’un journaliste les abordait sur le sujet et adresser discrêtement des œillades amoureuses à Monsieur Lemplein lorsqu’ils le croisaient. Le plus étonné dans tout cela était Monsieur Lemplein qui n’avait jamais eu l’intention de tenir publiquement des propos fustigeant l’immigration mais avait seulement dit un jour à sa compagne que les démocraties occidentales étaient débordées par une immigration grandissante, De jour en jour, Monsieur Lemplein se voyait proposer des soutiens encore discrets d’un grand nombre de membres de son parti. La pression devenait trop forte, il lui fallut soit se laisser porter par cette vague montante qui le poussait vers la tête du parti, soit rentrer dans le rang de la gauche mondialiste bien pensante. Il voulut maintenir l’ambiguité et dans son discours reprit, un peu embarassé, que les démocraties occidentales étaient débordées par une immigration grandissante. Cela fit l’effet d’une digue qui se rompt: la gauche devenait nationaliste après avoir prétendu être socialiste! Les députés de centre droit et notamment du Parti des Travailleurs Républicains, le PTR se régalèrent dans l’hémicycle du parlement, fustigeant le national-socialisme de triste mémoire. Il y eut de belles envolées lyriques d’une vibrante indignation. M. Lemplein ne rentrait que tard chez lui le soir, après avoir enfin esquivé les journalistes. Il retrouvait son appartement vide mais propre et bien rangé. Jana avait réceptionné les courses qu’il avait commandées par internet et quand il n’avait pas dîné au restaurant avec d’autres députés de son parti, il se faisait chauffer au micro ondes une des barquettes de cuisine asiatique que le supermarché lui avait livrées. Cela arrivait rarement cependant car il paraissait à beaucoup qu’il était de plus en plus probable qu’il allait être élu président du PVR et faire exploser le clivage gauche droite qui divisait les partis politiques français depuis 80 ans et on l’invitait beaucoup. C’est dans ce contexte qu’il reçut Laroche à dîner chez lui. Que le ministre de l’intérieur, ancien chef du PTR ait demandé à le rencontrer était déjà une surprise de taille, qu’il ait accepté de venir chez Lemplein en était une plus grande encore. Il s’agissait d’être discret et Laroche savait, on se demande comment, que l’appartement avait une entrée par un escalier de service qui donnait sur une autre rue qui permettait d’entrer et sortir sans que l’on sut qu’on se rendait chez Lemplein, avantage précieux en politique. Lemplein avait demandé à Jana de préparer le repas et de faire le service à table, comme si elle était la maîtresse de maison qui s’éclipserait une fois une fois le charriot roulant avec le repas chaud apporté. C’était pratique car par un heureux hasard qui n’en était pas tant un, car de nombreuses personnalités politiques habitaient le 6e arrondissement de Paris, Laroche habitait à 300 mêtres et pouvait donner à penser à des curieux qu’il rentrait chez lui et après avoir vérifié qu’il n’était pas suivi, se rendre chez Lemplein, rue Dugay-Trouin. Pourquoi fallut il qu’après avoir escaladé l’escalier de service étroit de l’immeuble de Lemplin, lorsque la porte de l’escalier de service s’ouvrit, il se retrouva en face de sa femme de ménage? Jana avait en effet d‘autres clients dans ce riche quartier parisien et le domicile privé du ministre de l’intérieur était un autre lieu où elle venait plusieurs par semaines faire des ménages. La rencontre de sa femme de ménage chez le chef de l’opposition plongea le ministre Laroche dans un sentiment de stupéfaction et d’effroi qu’il ne put dissimuler. Il était manifestement tombé dans un traquenard et hésitait entre dévaler les escaliers en courant pour s’enfuir, ou bien aller se dissimuler sous un meuble. Il fut à peine rassuré , lorsque se tournant vers le chef de l’opposition Lemplin, Jana s’écria : « Monsieur Laroche ! je fais également le ménage chez lui ! », l’expression de stupeur et d’effroi que Laroche lut sur le visage de Lemplin le rassura un peu. Ils se regardèrent tous deux puis éclatèrent de rire. C’était trop fort ! Le ministre en place, et le chef de l’opposition avaient sans le savoir la même femme de ménage ! Ils continuèrent à rire de façon forcée afin d’essayer de trouver une contenance. En s’avançant dans le salon, Laroche jetait des coups d’œil furtifs à droite et à gauche, s’attendant à voir surgir un journaliste ou un photographe, mais personne ne parut
« – vraiment vous ne m’avez pas tendu un piège ?

  • Mais je vous assure que non. Je suis le premier surpris ! Comment aurais-je pu prévoir ? Jana ne m’a rien dit ! »
    Tous les deux continuèrent à rire mais c’était trop gros. En même temps qu’ils s’efforcèrent de dire des banalités prudentes sur la situation politique actuelle , les deux hommes faisaient intérieurement la liste de toutes les singularités de leur vie intime que l’autre pouvait déjà connaître où même seulement connaître dans le futur et se demandaient ce que Jana avait bien pu où pourrait à l’avenir rapporter sur la vie intime de l’autre. Les deux hommes allaient ils trouver, comme beaucoup l’espéraient, une troisième voie qui allait permettre de mettre fin à cette idéologie gauche droite qui avait rythmé la politique française depuis plus de 60 ans et allaient ils présenter un projet commun plus adapté au monde moderne et complexe, que les dirigeants politiques allaient devoir gérer ? Pouvait-on encore et toujours se lamenter sur cette vision manichéenne de la société, qui voulait que ce qui fut à gauche, fut généreux et favorable au peuple tandis qu’à droite, on cherchait seulement à privilégier une classe de possédants ? Mais le cœur n’y était pas. Ils se séparèrent sur la promesse vague de se revoir pour mettre sur pied ce programme politique qu’ils s’étaient fixés comme sujet de la rencontre de ce jour. Durant le repas, ils ne parlèrent que de cuisine et de diverses choses anodines. Jana faisait le service comme lui avait demandé LEMPLIN, en s’efforçant de se comporter comme une maîtresse de maison, ce qui rendait perplexe le ministre suspicieux sur la réalité du statut de Jana dans cette maison. les deux personnalités politiques se séparèrent poliment. On ne fut au final convenu que d’une seule chose que les deux hommes n’osèrent pas avouer. Il fallait renvoyer Jana sans délai ce qui fut fait. Abasourdie, Jana qui croyait avoir satisfait au mieux ses deux patrons se vit brusquement congédiée avec en prime une liasse de billets de banque contre la promesse qu’elle ferait silence sur son expérience professionnelle chez les deux hommes et qu’elle retournerait au plus vite en Slovaquie. Le ministre était un homme puissant. Il pourrait lui arriver bien des ennuis si elle restait en France. Jana fit sa valise et retourna sans doute dans son village perdu quelque part dans la chaîne des montagnes des Tatras. Les deux dirigeants politiques la regrettèrent car ils ne purent retrouver une employée de maison qui fut aussi discrete et efficace. Mais le plus malheureux fut encore Lemplein, car l’échec de sa rencontre avec le ministre transpira dans son parti. On chercha à exploiter cet échec pour prendre sa place. Il n’était sans doute pas la personnalité qui pouvait conduire le parti dans la nouvelle voie où il l’avait engagée. Il fut révoqué de ses fonctions de secrétaire général du parti et redevint un simple membre du parti. Il continua sans conviction à assister aux réunions et participa aux débats de façon distraite. Ah comme on pouvait descendre vite en politique! finies les attentions, les poignées de mains empressées et serviles, les sourires de connivence. Il faisait l’expérience douloureuse et amère pour celui qui était devenu quelque chose: l’expérience de l’indifférence. Il rentrait chez lui le soir dans une maison vide. Jana ne lui avait pas préparé un potage comme elle savait le faire. La nouvelle femme de ménage n’avait pas su complêter la liste des courses qui devaient être livrées. Il ne recevait plus toutes ces petites attentions délicates qui trahissaient la présence discrête et attentionnée de Jana quand il rentrait. Les bûches n’avaient pas été disposées dans la cheminée, de sorte qu’une simple allumette suffisait pour allumer le feu. Son journal et sa tasse n’étaient pas disposés sur le guéridon où il était habitué à les trouver à son réveil. Son linge n’était pas rangé avec soin comme il fallait. On n’avait pas pensé à arroser les plantes, ni à ranger la vaisselle… bref, toute une série de menus services qui ne rentraient pas précisément dans les taches qu’on lui avait assignées et qu’il avait à peine remarquées. Cette présence fugitive mais bienveillante n’était plus là. Le coup de grâce lui fut porté par sa fille, lorsque dans une de ses visites chez son père, elle demanda après Jana qui lui donnait des conseils pour ses cours de violon. C’est vrai, il n’y avait jamais prêté attention mais Jana jouait fort bien du violon. Oui c’était bien Jana qui jouait du violon avec sa fille alors qu’elle avait fini son service. Sa fille lui apprit qu’elle avait été au conservatoire dans son pays et qu’elle y était même une artiste reconnue là-bas. Comment avait-il pu ne pas s’en rendre compte ? Plus le temps passait, plus l’absence de Jana lui pesait. Il y avait un grand vide dans l’appartement et cela ne datait pas du départ de sa femme. Elle avait été tellement absorbée par son travail qu’elle semblait n’y séjourner que comme dans un hall de gare, toujours entre deux trains, l’ordinateur portable sur les genoux et le téléphone calé sous l’oreille. Sa fille avait quitté l’appartement pour vivre avec son copain et ne venait que de temps à autre et notamment pour exercer son violon avec Jana . Il réalisait que cette présence tendre, bienveillante et attentionnée qui avait fait son bonheur n’était pas tant celle de sa femme, cette femme brillante, dominatrice et comme lui ambitieuse mais celle de son ombre obscure, soumise et modeste, celle de Jana dont l’accent slave coulait comme un ruisseau. Une nuit, il se réveilla en sursaut. Dans son rêve, Jana lui avait souri. Oui il se souvenait qu’un jour Jana lui avait souri avec une expression tendre. Il ne savait plus pourquoi mais oui un jour, ils avaient été face à face, silencieux, un instant et elle lui avait souri. Il devait le retrouver ! Quelle bêtise de l’avoir congédiée. Il devait la retrouver et lui expliquer que c’était un malentendu, qu’il avait besoin d’elle. Il décida de faire des recherches, mais il ne savait pratiquement rien d’elle, même pas son nom de famille! Comme il ne l’avait pas déclarée aux organismes sociaux pour son emploi, il ne connaissait même pas son identité. Elle faisait partie de ces gens qu’on utilise quand on en a besoin et qu’on jette aussitôt qu’on a plus besoin d’eux. Le chef du parti de gauche, le plus en vue, avait finalement été toujours davantage préoccupé par les intrigues politiciennes que par la réalité du peuple qu’il prétendait représenter. Comment pouvait-il la retrouver ? Elle avait été également la femme de ménage du domicile particulier du ministre Laroche mais où habitait le ministre. Il n’allait tout de même pas écrire au ministère pour essayer de la retrouver ! Sa lettre n’aurait même pas été lue, et pire même si elle avait été lue, on aurait vite conclu que lui, un homme de gauche employait des gens sans les déclarer pour économiser les cotisations sociales! Cette perspective, le remplit d’épouvante. Il ne s’était jamais posé la question de la régularité de la situation de sa femme de ménage. Il avait laissé sa femme gérer cela. Elle avait peut-être gardé des informations mais leur divorce avait été douloureux et il était très peu probable que sa femme l’aiderait à retrouver Jana. Pire même, peut-être allait-elle exploiter cette demande pour établir de plus fort ses infidélités ! Il chercha à ruser. Il demanda à sa fille de demander à sa mère où retrouver Jana . Il voulait lui faire le cadeau de lui offrir des cours de violon. Sa fille devina que la motivation était ailleurs mais son père était manifestement malheureux. Elle n’en fit rien paraître et puis elle aurait bien aimé retrouver ce professeur si bienveillant, et qui auparavant ne demandait même pas à être payée pour les cours donnés, mais tout ce qu’elle put obtenir, c’était un vague nom de famille et un vague nom de village Soporna, quelque part dans un coin perdu à quelques 70 km de Bratislava. Toutes les recherches sur Internet ne donnèrent rien, mais c’était plus fort que lui. Il ne pouvait renoncer. Il prétexta diverses obligations et se rendit en Slovaquie. Le village n’était en fait guère plus qu’un hameau, occupé de petites maisons basses, entouré d’un jardin avec des clôtures en bois reliés par des chemins eux-mêmes reliés par des chemins de terre empruntés par des carrioles tirées par des chevaux. Les subventions européennes pour la modernisation de cette région étaient allées dans des poches plus profondes que le lac avoisinant et les travaux de construction des routes n’avaient été réalisés qu’en faible partie. Il erra dans ce village, frappa à diverses portes pour demander à parler à Jana . Personne ne la connaissait. On le regardait comme un fou. Finalement on l’envoya dans une ferme éloignée. Un grand vieillard d’une belle stature était occupé à fendre des buches avec une hache. Il le fit entrer sans façon dans sa maison, appela sa femme qui présentait comme son époux, un beau visage lisse sous une abondante chevelure blanche. Les deux époux l’écoutèrent avec attention. Ils semblaient comprendre l’anglais, ce qui était assez rare chez des gens âgés dans cette région post-soviétique. Les deux époux échangèrent quelques mots en slovaque, se sourirent et il se retrouva à table pour partager leur repas, un repas fort simple composé de quelques légumes, d’un fromage de chèvre et d’un pain dur pour lequel il fallait avoir les dents solides et qu’on faisait descendre avec une carafe d’eau fraiche. On le fit répêter, raconter son périple mais on ne semblait pas prêter attention à ses réponses. Finalement l’homme demanda mais pourquoi avez-vous fait tout ce voyage pour la retrouver ? qu’est elle au juste pour vous ? Il n’avait pas prévu cette question. Elle était pourtant évidente. Que faire ? mentir ? dire la vérité ? on l’aurait pris à raison pour un fou ! L’homme politique qu’il était se souvint de ce mot qu’on prêtait à un autre homme politique de renom, l’anglais Churchill : il faut savoir dire la vérité mais pas toute la vérité. Aussi il dit simplement :
    -elle travaillait pour moi. Je l’ai licenciée par erreur. J’ai commis une injustice. Je voudrais réparer.
    Les deux époux se regardèrent avec un sourire amoureux, et tout au long du repas ils continuèrent à échanger des regards tendres, et il y avait dans ces regards tellement d’amour que bien des années plus tard Lemplin s’en souvenait encore.
    Non, ils ne connaissaient pas Jana , ils avaient pourtant eux aussi beaucoup voyagé. Ils avaient été comédiens au théâtre national où ils avaient fait une belle carrière, puis s’étaient retirés dans cette ferme et vivaient de très peu de choses. Ils avaient même joué Shakespeare à Paris. C’était sans doute parce qu’on savait qu’ils parlaient anglais qu’on l’avait envoyé chez eux. Après le déjeuner, comme ils avaient sympathisé, on lui offrit une promenade en carriole tirée par le cheval autour du lac, puis on le ramena à la gare la plus proche. Il y avait bien un autre village qui portait un nom semblable, plus loin encore, dans un endroit encore plus isolé. Lemplin décida de s’y rendre. Ce pays secret, verdoyant avec ses habitants si hospitaliers commençait à lui plaire. Le contrôleur dût lui faire plusieurs fois signe d’avoir à descendre lorsqu’il fut arrivé, car lorsque le train s’arrêta, en guise de gare, il n’y avait qu’un quai enfoui dans la forêt et à peine un panneau indiquant un nom. Il descendit et marcha. Il n’y avait personne autour de lui. La forêt, s’étendait silencieuse, douce, indifférente, mais il croyait voir le fantôme de Jana s’enfuir chaque fois un peu plus loin. Il s’avança encore dans la forêt. Il lui semblait qu’il disparaissait peu à peu dans cette forêt. Un sentiment d’angoisse le saisit et cherchant le ciel entre les cimes des arbres, il cria « Jana » puis éclata en sanglots et s’effondra sur le sol. Toute sa vie, il avait couru après une ambition. Il avait rencontré L’Humanité et il l’avait laissée s’échapper.

Publié le

dans

par